« Amour de l’eau » de Victor Hugo [1] est tiré de « Les chansons des rues et des bois », livre second chapitre IV (1865) :

 » Je récite mon bréviaire
Dans les champs, et j’ai pour souffleur
Tantôt le jonc sur la rivière,
Tantôt la mouche dans la fleur.

Le poète aux torrents se plonge;
Il aime un roc des vents battu;
Ce qui coule ressemble au songe,
Et ce qui lave à la vertu.

Pas de ruisseau qui, sur sa rive
Où l’air jase, où germinal rit,
N’attire un bouvreuil, une grive,
Un merle, un poète, un esprit.

Le poète, assis sous l’yeuse, [chêne vert]
Dans les fleurs, comme en un sérail,
Aime l’eau, cette paresseuse
Qui fait un si profond travail.

Que ce soit l’Erdre ou la Durance,
Pourvu que le flot soit flâneur,
Il se donne la transparence
D’une rivière pour bonheur.

Elle erre; on dirait qu’elle écoute;
Recevant de tout un tribut,
Oubliant comme lui sa route,
Et, comme lui, sachant son but.

Et sur sa berge il mène en laisse
Ode, roman, ou fabliau.
George Sand a la Gargilesse [maison de George Sand]
Comme Horace avait l’Anio. »

L’Anio est un affluent du Tibre qui alimentait plusieurs aqueducs de la Rome antique où le poète latin Horace (-65;-27), à l’instar de George Sand [3], avait sur sa rive une maison de campagne. Il écrit dans ses « Odes » :

« …
Mon coup de foudre à moi, ce n’est
Ni l’endurante Sparte ni la grasse Larisse,
Mais la grotte sonore d’Albuna,

Les cascades de l’Anio, le bois de Tiburnus,
Les vergers où courent les eaux vives.
Tout comme Albus Notus [le vent du midi] souvent nettoie le ciel,
Loin d’engendrer pluies perpétuelles »

Quant à Victor Hugo, en dehors de Paris [2], il aimait se détendre dans la vallée de la Bièvre au domaine des Roches où il écrit entre autres « Les rayons et les ombres » :

« Hélas ! hélas ! dit le poète,
J’ai l’amour des eaux et des bois;
Ma meilleure pensée est faite
De ce que murmure leur voix. »